Où s’arrête-t-il en route pour se reposer?
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Sur la route de vacances
Je vais dans le Midi pour passer mes vacances avec ma fille Anne. Ce matin j’ai pris ma vieille voiture et j’ai quitté Paris.
Attention poste à essence. Je vais en profiter pour me dégourdir un peu les jambes. Il fait bon, cela fait longtemps que je n'avais pas senti le soleil sur mon visage, encore une sensation oubliée.
Je regarde la devanture d’une boutique devant moi, et brusquement, je Le vois. J'aurais cru avoir passé l'âge du coup de foudre, mais alors là, c'est brutal. Exactement ce qu'il me faut: un costume strict, deux boutons, mais alors en toile jean, avec des poches surpiquées, pantalon large du bas, exactement mon rêve.
Un regard rapide sur l'étiquette: c'est dans mes prix. Ma respiration s'est bloquée.
Acheter, comme ça, sans réflexion longuement mûrie, sur l'autoroute, c'est de l'inédit, c'est l'Aventure à l'état brut.
Un autre coup d'œil dans la boutique; la vendeuse est seule. Allez, je tente le coup. Ça sera bien d'arriver là-bas un peu moderne, Anne sera ravie, puis quoi, c'est les vacances.
J'entre. Elle vient vers moi, tranquille, pas du tout intimidante, et les vendeuses qui ne m'intimident pas, ça se compte sur les doigts de la main.
«Ce serait pour le costume dans la vitrine, le bleu.
Elle trouve tout à fait naturel que j'aie envie de ça. Elle louche sur mon complet gris anthracite.
«C'est extrêmement léger à porter, très agréable, et l'été va être chaud… Ce modèle a beaucoup de succès … Voulez- vous essayer?»
Les choses vont à une folle rapidité. Je me retrouve dans la cabine avec l'objet de mes désirs dans les bras. Est-ce bien moi? Je me sens incroyablement léger, d'une élégance nuancée de nonchalance; ce costume est un miracle: le compromis parfait entre l'attaché d'ambassade et le cow-boy d'Arizona. Je sors.
«Il vous va parfaitement, il n'a besoin d'aucune retouche».
«J'avoue que je suis assez tenté, mais vous ne trouvez pas cela un peu … comment dire … un peu jeune?»
Elle a des yeux châtains qui brusquement s'étonnent.
«Mais pas du tout! Cela vous va très bien, vous avez tout à fait le genre à porter cela, à la fois habillé et pratique. Hier, c'est un monsieur d'au moins soixante ans qui nous en a pris un, n'ayez aucune crainte …»
Soixante ans! Cette dernière remarque me décide définitivement.
«Je le prends.»
«Vous voulez le garder?»
«Oui, il va faire chaud en effet …»
Elle me fait un paquet de mon ancien costume et me le tend. Je ressors dans le soleil. J'ai envie de faire des claquettes. Décidément, c'est un jour brillant. La voiture roule, j'achète un costume fantastique, il fait beau, je vais chez Anne, j'ai vingt ans de moins. Youpi!
Curieusement, je ressens une sensation oubliée depuis bien longtemps: j'ai faim. Et me voilà installé contre la vitre, tout faraud dans mon costume léger. Le soleil inonde la salle et fait miroiter les tables en plexiglas. La carafe de rosé est tout embuée, ma salade est là, dans mon assiette: il y a du riz, des olives, des œufs durs, des petits cubes de je ne sais pas quoi exactement mais c'est très bon. Il y a du monde, une musique en sourdine. Encore cent cinquante tout petits kilomètres et je quitterai l'autoroute.
D’après Patrick Cauvin «L’amour aveugle»